Comment former à la pédagogie Montessori ?

Je viens de vivre une expérience magnifique à Archamps, en Haute-Savoie, où Benoit Dubuc, formateur Montessori 6-12 ans, met en œuvre son 4ème cours international.

Jeudi 22 février à 8h30, le cours s’ouvrait par une voix douce, celle d’une étudiante qui entonnait :

On vous souhaite tout le bonheur du monde
Et que quelqu’un vous tende la main
Que votre chemin évite les bombes
Qu’il mène vers de calmes jardins

Il y a plein de manières d’apprendre une théorie, une pratique, de s’exercer et de se sentir compétent. Mais voilà, lorsqu’on est confronté avec la réalité des enfants, d’une classe, les difficultés commencent, les doutes surgissent, des renoncements opèrent…
La pédagogie Montessori est une démarche scientifique mais aussi une philosophie. Une immense remise en cause de la posture traditionnelle de l’enseignant. Elle ouvre au respect profond de l’enfant, apte à bouleverser les adultes que nous sommes plus ou moins devenus, au gré d’une éducation parsemée d’obstacles et de quelques blessures jamais véritablement pansées. Elle vise le développement du potentiel humain.
La pédagogie Montessori est vertigineuse !

On vous souhaite tout le bonheur du monde
Pour aujourd’hui comme pour demain
Que votre soleil éclaircisse l’ombre
Qu’il brille d’amour au quotidien

Comment accueillir chacun avec sa personnalité, son passé, ses doutes, ses exigences, ses capacités ? Comment l’accompagner dans cette traversée de soi autant que dans l’apprentissage théorique et pratique de la pédagogie ? Pour qu’il puisse s’envoler, se diriger vers son potentiel humain et qu’à son tour, il puisse déployer son énergie au service des enfants ? L’envol est une question d’habileté, de force, mais aussi de soutien.

Puisque l’avenir vous appartient
Puisqu’on n’contrôle pas votre destin
Que votre envol est pour demain
Comme tout ce qu’on a à vous offrir
Ne saurait toujours vous suffire
Dans cette liberté à venir
Puisque on sera pas toujours là
Comme on le fut aux premiers pas

Pour Benoît Dubuc c’est très clair : le formateur doit œuvrer comme un éducateur Montessori. C’est à dire préparer un environnement propice à la cohésion humaine et au travail. Puis, cultiver la posture montessorienne d’accompagnement et de non jugement comme y invitait Maria Montessori : « [L’éducateur est] le gardien et le protecteur de la vie émergente. Son art est d’être toujours prêt à répondre et à aider là où c’est nécessaire. Il laisse la vie s’épanouir librement dans les seules limites du bien. Sa tâche est de donner l’opportunité à l’enfant de développer ses forces intimes et de devenir maître de lui-même»

Toute une vie s’offre devant vous
Tant de rêves à vivre jusqu’au bout
Sûrement plein de joie au rendez-vous
Libre de faire vos propres choix
De choisir qu’elle sera votre voie
Et où celle-ci vous emmènera
J’espère juste que vous prendrez le temps
De profiter de chaque instant

Benoît Dubuc s’entoure donc d’une considérable équipe. A la fois d’autres formateurs AMI et d’anciens étudiants à lui pour accompagner les stagiaires à l’immense tâche de devenir éducateur Montessori. La formation d’éducateur 6-12 ans, qui s’étale sur 2 années, c’est 22 semaines de formation dont 300 h de cours et 150 h de pratiques supervisées (1200 présentations à connaître !) auxquelles il faut ajouter 3 semaines de stages d’observation et 4 semaines de stages de pratique.

Durant ces 15 jours, était présente Uma Ramani, diplômée 3-6 et 6-12 et formatrice 3-6, directrice d’un centre de formation à Dallas. Elle a exposé les grands principes, les fondements théoriques du 3-6 car la formation 6-12 commence par une formation condensée du 3-6.

Uma Ramani est une de ces personnes qui suscite, au premier coup d’œil, respect et admiration. Elle incarne l’autorité intellectuelle tout autant que l’humilité des grands devant les petits.

Debout, presque immobile, une tasse de thé à la main, avec des phrases courtes dites dans un anglais très clair (traduit simultanément en Français), les 50 étudiants l’écoutent dans un silence absolu. Ni parole, ni geste inutile, tout comme bon éducateur 3-6 ! Plus qu’elle n’enseigne, elle convoque l’intelligence de chacun par les multiples questions qu’elle pose, par la profondeur de ses propos. D’ailleurs, de tous ces cours, l’étudiant ne devra pas donner des résumés mais des schémas illustrant un point particulier, écrire une réflexion personnelle sur un texte à lire, etc. La pose venue, on a du mal à se libérer de cette atmosphère sérieuse, exigeante. Ne faut-il pas cela pour celles et ceux qui se destinent à accueillir les précieux dons de l’humanité que sont les enfants ?

Extraits de sa conférence sur Liberté et Discipline :

« Le développement de l’enfant est comme une rivière qui doit suivre son cours jusqu’à la mer. Si un obstacle se trouve dans le lit de la rivière et que l’enfant ne suit pas son cours naturel, la rivière se dévie, il peut y avoir des inondations, des crues,.. »« Lorsqu’on voit des déviations chez l’enfant, on doit se poser cette question : qu’est-ce qu’il y a dans l’environnement qui produit ces déviations ? Il faut donc identifier puis supprimer les obstacles produits par l’environnement. Sans oublier les obstacles situés à l’intérieur de nous-mêmes. »
« Si l’enfant doit obéir à des lois qui ne sont pas les siennes, alors survient l’indiscipline. »
« Si on veut établir les bases de la discipline, on doit faire en sorte que l’environnement fonctionne avec les lois naturelles et établir des règles qui sont en accord avec les lois innées de l’enfant. »
« On peut faire des listes et des listes des règles arbitraires infligées aux enfants : pas plus de 3 enfants à la fois dans la bibliothèque, etc. »
« Pour préparer l’environnement il faut se poser la question : qui est cet enfant ? Quels sont ses pouvoirs, ses manières d’agir, ses besoins, ses tâches ?. C’est seulement avec cette compréhension qu’on peut penser à préparer l’environnement.Un exercice d’observation : noter le temps que les enfants consacrent à s’adapter à un environnement non préparé pour eux. Penser à tous les aspects de la vie de l’enfant : où vont-ils travailler, manger, se divertir, se reposer… ? Une fois que tout est défini, on peut penser à installer le matériel. »

« Quel est notre contrôle de l’erreur en tant qu’éducateur ? La joie de l’enfant ! » 

A l’issue de la dernière conférence d’Uma Ramani, la joie se lisait dans les yeux humides des étudiants.

Alexandre Mourot, réalisateur, auteur du film Le maître est l’enfant, éducateur AMI 3-6 ans.

Pour en savoir plus sur cette formation : https://www.montessorifrancophonie.org
La chanson : Tout le bonheur du monde, auteur Sinsemilia

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